Syndrome toxi-infectieux grave au décours d’une cure de prolapsus avec pose d'une prothèse non résorbable par voie vaginale : retard de diagnostic entraînant le décès de la patiente...
Saisine de la CRCI le 22 octobre 2012 par les ayants-droit de la patiente pour obtenir l’indemnisation du préjudice qu’ils avaient subi.
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Les experts, l’un chirurgien libéral compétent en gynéco-obstétrique et l’autre anesthésiste-réanimateur du CHU, estimaient que : « (…) La patiente était décédée d’une cellulite pelvienne (ou gangrène de Fournier) post-opératoire. Celle-ci était secondaire à la pose d’une prothèse synthétique pour une cure de prolapsus. Cette prothèse Prolift® avait été retirée du commerce aux Etats-Unis en mars 2012 par son fabricant. Les chirurgiens en avaient été avisés par un courrier du fabricant en juin 2012 faisant état d’un retrait à effectuer, en France, au plus tard en mars 2013. Le risque infectieux, grave mais exceptionnel, n’était pas la cause de cet arrêt de commercialisation (…) » (voir Commentaires). De l’avis des experts, « (…) Il ne pouvait être reproché au chirurgien d’avoir utilisé ce matériel et il y avait un risque rare de gangrène gazeuse dans toute intervention chirurgicale du petit bassin (0,2 à 0,4 %) (…) »
En fait, « (…) Le dommage résultait dans l’absence de prise en compte de la symptomatologie du 19 au 24 juillet, de l’absence de diagnostic de la cellulite du 24 au 26 juillet alors que tous les éléments de diagnostic étaient présents et de l’absence de réalisation d’un geste chirurgical le 26 juillet au retour du centre hospitalier qui devait être réalisé quelles que soit les conditions horaires.
Le 24 juillet, le compte-rendu du scanner abdominal décrivait bien ʺun épanchement GAZEUXʺ dans le rétro-péritoine et le pelvis. Cette constatation associée à un syndrome biologique infectieux important ainsi qu’à des douleurs pelviennes et des membres inférieurs, devait faire immédiatement penser à une cellulite grave, expliquant la confusion mentale et imposant une réintervention en urgence. En effet, la mortalité en cas de cellulite pelvienne, varie de 16 à 25 %, mais elle est d’autant plus élevée que la prise en charge chirurgicale est tardive Or, le diagnostic évoqué par le chirurgien et l’anesthésiste a été celui d’accident vasculaire cérébral sans aucune justification clinique, diagnostic, en outre, maintenu malgré la normalité du scanner cérébral , et ayant même conduit à la prescription d’un corticoïde puissant en IV qui ne pouvait qu’aggraver la cellulite (…) »
Dans la survenue de cet accident médical fautif, les experts évaluaient à 75% la responsabilité du chirurgien et à 25 % celle de l’anesthésiste. En revanche, ils ne relevaient aucune anomalie dans l’organisation de la clinique.
De même, ils estimaient que la prise en charge de la patiente au centre hospitalier avait été adaptée en soulignant notamment « une réelle confraternité pour le chirurgien qui a été contacté par téléphone pour savoir s’il était d’accord pour reprendre en charge sa malade ».
Avis de la CRCI (mai 2013)
« (…) Au regard des examens radiologiques et biologiques réalisés le 24 juillet, le diagnostic de cellulite devait être posé. Il est établi que le chirurgien et l’anesthésiste n’ont pas tiré de conséquences des signes cliniques présentés par la patiente (écoulement vaginal, douleurs, rougeurs sur le pubis, hyperthermie..) et n’ont pas remis en cause le diagnostic neurologique évoqué. Ce comportement n’est pas conforme aux règles de l’art et aux données acquises de la science. Le décès de la patiente est directement imputable à ce retard de diagnostic et, par conséquent à ce retard de prise en charge (…) »
La CRCI estimait que la responsabilité du chirurgien était engagée à hauteur de 75 % dans le décès de la patiente et celle de l’anesthésiste à hauteur de 25 %.
Dans un communiqué de presse publié le 5 juillet 2012, le laboratoire fabricant de la prothèse utilisée dans cette observation avait annoncé l’arrêt de sa commercialisation, ainsi que celle d’autres produits voisins : « (…) Ces produits ne font pas l’objet d’un rappel et nous continuons à faire totalement confiance à leur innocuité et à leur efficacité. La décision d’arrêter la distribution de ces produits est liée à leur viabilité commerciale face à l’évolution actuelle de la dynamique du marché (…) » (référence 5). Des chirurgiens gynéco-obstétriciens ont fortement contesté cette décision prise unilatéralement (références 5, 6).
A noter la publication en 2010, d’une observation d’ « Erosion rectale d’une prothèse pour cure de prolapsus vaginal (Prolift®) ». Cette complication est survenue 5 mois après l’intervention pour prolapsus et s’est manifestée par des saignements dus à une ulcération sus-anale. Lors de la réintervention par voie transanale, la prothèse « visiblement trop longue », a pu être mobilisée jusqu’en tissu sain puis localement réséquée (référence 7).
A priori, la complication rapportée par cette publication n’apparaît pas avoir de lien avec l’observation présentée